La vie n’est qu’une condamnation à mort différée. Cela concerne autant l'homme que la nature profonde et intéresse tout ce qui est. L'ensemble de l'univers est soumis à cette règle. Seule l'énergie dégagée par cette anamorphose survit. Il n'y a que les forces impalpables des pouvoirs de l'esprit qui détiennent le substrat de l'infini. Tout étant éphémère et impermanent, la métamorphose n'est qu'une suite normale de l'évolution. Tout change sauf l'homme. Égal à lui-même il reste ce qu'il a toujours été. Égoïste, vindicatif, vulgaire, menteur, assassin, avide, tortionnaire et corrupteur. La poignée de visionnaires, philosophes, artistes, savants et musiciens qui ont traversé les millénaires a en vain tenté de mettre de l'ordre dans cette gabegie.
L'Homme, cet animal doté d'une réflexion pointue et disposant par ailleurs de vastes possibilités d'accès à la connaissance, ignore le potentiel à concevoir sa structure et sa richesse mentale.
Ses capacités à affronter problèmes et distorsions sont passées par pertes et profits. il devient l'artisan de ses propres malheurs. À gadgétiser son existence, il perd son chemin et foule ses talents aux pieds. Tabler sur l'avoir au lieu du savoir, paraître au lieu d'être le place en porte à faux de ses attentes. Le désir de combattre la solitude et la crainte de se révéler à lui-même le fait pactiser avec le virtuel. Un clic et apparaît l'image qui chassera les afflictions de la vie et fera rêver de bonheur le temps d'une illusion. L'Homme, de moins en moins combatif, résigné devant l'adversité, fait l'éloge de la vitesse et de la course effrénée vers la réussite dont il ne sait que faire et s'encouble dans les fils ténus de l'absurde.
En considérant l'état actuel de la planète, il est permis de penser que personne ne désire compromettre son confort, ses habitudes et ses plaisirs afin d'accroître la pérennité du vivant.
La planète, elle, perdura jusqu'à son anamorphose et sa destruction avant de resurgir dans les éclats de lumières du carrousel des créations. Aujourd'hui, une grande majorité de Terriens dansent au son de l'orchestre dans une ambiance rappelant celle du Titanic au moment du naufrage. Ils sont à cent lieues de comprendre ce qui leur arrive. Le domaine politique et géopolitique n’est pas mieux loti. La réflexion, le bon sens, l'engagement, le savoir-faire et l'aptitude décisionnaire ne sont plus d'actualité.
Les politiques contradictoires répondent davantage à des intérêts personnels qu'à des exigences populaires dont les difficultés et la misère s'amplifient. Rien ne va plus. Les extrêmes et les clans dictatoriaux se font à nouveau entendre.
Le bruit de bottes et les pas cadencés rappellent des sombres souvenirs. L'Histoire repasse les plats sans que l'homme ne s'en émeuve outre mesure. Le sort de l’homme est devenu imprévisible et les plans d'avenir sont hypothéqués ou ne sont réservés qu'aux nantis, aux pistonnés et aux chanceux. Quand la confiance fait défaut, l'espoir se dissous. Il engendre dès lors un profond pessimisme et une totale indifférence envers la chose publique.
Le marketing mensonger des gouvernants, les promesses, qui reviennent à chaque votation pour asséner des formules qui resteront sans suites, ont eu durablement raison de la patience populaire. Il est très difficile d'en vouloir à l'électeur. C'est le pouvoir exécutif qui a scie la branche sur laquelle il est assis. Le court terme, à n'en pas douter, a raison des illusions.
L'Homme n'aime pas l'homme. Il le juge inopportun, voire concurrent ou considéré comme unennemi potentiel. Il est aussi, parfois, le miroir de ses propres forfaits, ce qui contribue à l’auto-dénigrement. C'est souvent contraint et forcé qu'il tolère ses congénères. Généralement de mauvaise grâce et seulement en cas de nécessité absolue. Il faut que son existence, ses besoins ou ses intérêts soient en péril. Qui plus est, il passe le plus clair de son temps à refréner des sentiments antagonistes pour mieux dissimuler la face obscure de son personnage. Cette vertu de caméléon permet de javelliser les consciences. Par le truchement du faux sacré, le cri de l’innocence se met au service de la trahison.
L'Homme est avide de querelles ! Grandiloquent dans les actions mineures, il est inhabile dans le dépassement de soi. Il refuse la remise en question et le combat de ses travers. Sa préférence va vers le confort du consensus pour éviter le risque d'un mauvais choix.
Ainsi, la vacuité remplace-t-elle la structure de l'inutile. C'est écrit depuis des millénaires. La simple logique explique le déroulé historique du vingt et unième siècle et le bon sens celui de la fin de la présente civilisation. L'être de pensée cède la place aux murmures de l'artifice et devient l'objet d'un catalogue général à but lucratif. Une sorte de mollusque au service de l'avoir inutile. Les dirigeants politiques ont, depuis belle lurette, atteint leur niveau d'incompétence. La maîtrise du pouvoir leur échappe.
Dépassés par les événements et la multiplication des problèmes tant nationaux, qu’internationaux, la corruption et le manque de vision, ils mentent, dissimulent et affabulent pour mieux cacher leur embarras et ne pas perdre la face.
Les populations, gavées d'illusions, se rebellent, ce qui était prévisible. Trop de paroles lénifiantes et d'assertions sans suite. Trop de misère et trop de privilèges cumulés entre les mains d'une minorité. Il faut se faire une raison, le dérèglement climatique est irréversible. Sa cause première est principalement imputable à des conditions naturelles. Le souffle cosmique qui en est responsable se manifeste plus ou moins régulièrement, depuis la nuit des temps, sans l'intervention de l'homme. Il fait partie d'un cycle.
L’Homme peut lutter contre la pollution, ce qui est la moindre des choses. Quant au reste, il n'est pas de taille. Le réchauffement suscite pourtant des questions pour l'heure insoluble. Comment canaliser, organiser et maîtriser l’immigration qui se profile à l'horizon ?
Il n'y aura ni frontière, ni barbelée, ni murs, capables de circonscrire le flot de malheureux en quête d'une vie meilleure. Aucune armée, à moins de procéder à un génocide cent fois supérieur à celui du dernier conflit, n'arrivera à endiguer la vague de sinistrés à la recherche d'un mieux-être.
Ce sera la revanche des sacrifiés et des immolés sur l'autel des dividendes. Ce sera la réponse des oubliés de la croissance. Ils feront valoir le prix des pillages, des viols et des abus de droit. Ils sont les trois quarts de l'humanité. Ce qui se met en place est la résultante d'une équation et la somme des égoïsmes. Ce sont les partages manqués et les iniquités enterrées.
Pour comprendre la voie empruntée par la présente civilisation, il faudrait disposer d'un «hyper grand-angle» à la place de l'œil, afin d'embrasser l'ensemble de la situation d'un regard.
À ce jour l'observateur ne dispose que de vues partielles sous forme d'un patchwork colorié sans épaisseur historique à l'échelle universelle. Il est vrai que la globalisation planétaire dessine, nolens volens, les contours d'un espace sans frontières à la disposition d'une humanité responsable et diversifiée. Cette transformation programmée dans le temps induira très certainement des souffrances et des désordres où mort et naissance se succéderont. Ces perspectives tombent sous le sens et correspondent au chaos généralisé de la planète.
Cette conversion vers une nouvelle conception de l'ordre planétaire semble nécessaire pour assurer la pérennité des espèces. Ce que l'homme ne semble pas comprendre ou refuse d'admettre, la nature le lui explique à sa manière, brutalement le plus souvent.
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